Salut La Cie,
Comme tu le comprends facilement, j’ai envie de te partager au fil de certains articles, les artistes qui ont pu avoir une grande influence sur moi, sur mon travail. Je sais que certains d’entre vous sont comme moi, ils aiment bien savoir comment le cuisinier travaille. Rien ne me plaît plus qu’un magicien qui m’explique son tour. Et il aura beau le refaire devant moi mille fois, je resterai toujours émerveillé.
Ma culture s’est forgée au contact des comics ou du cinéma américain des années 70, 80. Les livres à la maison, on ne savait pas trop ce que c’était, comme je te l’ai déjà dit. Ou alors, ça pouvait servir à allumer le feu, caler une meuble. Très efficace. Ou alors, le seul souvenir que j’ai vraiment de littérature, ce sont les dizaines de San Antonio de ma grand-mère qui sentait aussi fort que l’appartement dans lequel elle vivait.
Bref, hein.
Alors donc, tout était américain, ou de culture anglo-saxonne, musicalement, cinématographiquement, tout. Et puis, d’un coup, je me souviens d’avoir entendu rire mes parents. Devant la télévision, ils se marraient (chacun de leur côté, dans deux maisons différentes, mais j’ai vécu la même scène d’enfant de divorcés à quelques mois de différence). Sûrement pour des raisons différentes. La cause de tout cela ? « Un éléphant, ça trompe énormément ».
Evidemment, quelques années plus tard, j’ai fait le lien « La Guerre des boutons », « Nous irons tous au paradis », « Courage, fuyons », « Le grand blond », j’en passe et des meilleurs. Et à la tête de ce cinéma-là, Yves Robert.

Je ne vais commettre l’impair de ne pas évoquer Dabadie, avec lequel il a signé parmi ses plus grands succès, ou sa fidélité à plusieurs comédiens comme Rochefort. Mais ce grand monsieur, visiblement vrai chef d’orchestre a, non seulement une œuvre que je qualifie de superbe derrière lui (on a tous vu un film d’Yves Robert, on a tous aimé un film d’Yves Robert), mais il a montré une qualité essentielle à mes yeux : savoir s’entourer. D’où la mention des deux monstres d’auteur et de comédien cités plus haut.
Là, où dans mes études, tout le monde ne parlait que de Truffaut (qui me touchait par sa « Nuit américaine » ou par le génie de la série des Doisnel), Godard (qui ne m’a jamais rien inspiré que de longs baillements) ou Sautet (auquel j’ai mis du temps à accéder), je n’avais d’yeux que pour le cinéma d’Yves Robert, que je trouvais à hauteur d’homme. Rien au-dessus, rien en-dessous. Toujours à la bonne hauteur, et à la juste distance.
Sa filmographie, tu peux la retrouver ICI, et chacun de ses films que l’on aime, c’est comme se remettre sous une bonne couette ou devant un bon feu de cheminée. C’est toujours un plaisir et une redécouverte. Même si on a l’impression de les connaître par cœur, il y a toujours, ici ou là un détail qui nous avait échappé. Quelle peinture de chaque époque, quels personnages…
Dans chacune de mes pièces où j’y ai parlé d’amitié (« Ceux que nous sommes » ou « La coulée douce », pour ne citer qu’elles), MA référence, c’était le cinéma d’Yves Robert. Ces héros du quotidien, leurs drames, la proximité des conflits intérieurs avec ceux des spectateurs, et ce talent de savoir les filmer dans leur force, leurs petites lâchetés, leurs travers et leur chemin.
Oui, on devrait toujours y revenir à ce cinéma-là, et avoir envie d’y vivre. Et moi, d’essayer de l’écrire.