Je souffle.
A cet instant, beaucoup de choses, d’images, défilent devant mes yeux. Des souvenirs par dizaines, comme si ce souffle se voulait être le dernier et la petite seconde, le résumé de mon passage sur Terre. Parfois, quand on est comme moi, à se partager entre les couloirs blancs des instituts et la cuvette de mes toilettes, on ne sait plus très bien à quelle philosophie se fier. Entre les moments d’espoirs, de grandes euphories et les chutes, les désirs d’abandons, viennent se glisser des secondes en suspension.
Je sais que je ne vais rien apprendre à qui que ce soit. Devant un précipice comme seul avenir, les derniers pas ont une saveur que l’insouciance masquait. Invariablement, on veut ralentir, mais la Terre ne tourne pas seulement autour du Soleil, mais aussi au-dessus de nos pieds. Alors, la tête qui jette un regard en arrière, on saisit ce que l’on peut encore un peu saisir.
Si j’avais su, hein ?
Tu parles, ça se trouve, si j’avais su, par peur, j’aurais couru n’importe comment et j’aurais sauté dans le vide, parce que je n’étais pas prête. Si j’avais su, oui, je n’aurais pas su dire ou me raconter comme je le fais aujourd’hui. Si j’avais su, au fond, la peur m’aurait emmurée. Alors, la tête par-dessus l’épaule, je prends et me souviens. Je malaxe des souvenirs pour les rendre un peu plus beaux. J’additionne des douceurs et des tendresses, je multiplie des douleurs entre elles pour vérifier si moins par moins, ça fait bien plus.
Sous mon souffle, ce que je fais vaciller, ce sont des petites flammes. Ce que j’ai en moi, ce sont des braises. Ardentes. Je fais comme je peux, je prends l’oxygène où il se trouve, mais à l’intérieur aussi, je souffle.
Je souffle. Et en un souffle, toutes ces bougies s’éteignent.
Je suis fière de moi, j’ai réalisé mon vœu de l’an passé et je commence celui de ma nouvelle année.
Je souffle.
Je suis vivante. Encore. Aujourd’hui, encore un peu plus.
Souffle de vie, souffle d’espoir, souffle de répits ….
Aujourd’hui tu es vivante …. et bien vivante !
Comment faire pour continuer à vivre ?
Demain, au réveil, la première chose que je penserais « je suis vivante » et la deuxième « merde pour combien de temps encore » … le scénario sera toujours le même. Pourquoi vivre, pourquoi avancer pas à pas. Pas de guérison possible. Jamais ….
Pourquoi moi ….. merde alors, pourquoi moi ? Qu’ai-je fais pour mériter ça ?
L’espoir ? mais il est où ? Les répits ….. mais pour combien de temps encore ?
Plus jamais ça ! Plus jamais ….. personne ne mérite autant de souffrance à l’extérieur comme à l’intérieur. Ce poison doit quitter ce monde.