« La nuit, en attendant le train » ext.

 » Ça pèse combien un deuil ? La peine, c’est en litres, c’est en coup de couteaux dans le bide qu’on la mesure ?

 

Je regarde ce coucher de soleil, y cherchant un adieu, un geste de la main, tu vois, comme un mouchoir agité par une vieille main depuis un wagon. Le type à la casquette a sifflé, la locomotive s’est mise en branle et puis c’est parti. Et toi, sur le quai, tu cherches un cailloux pour taper dedans, pour t’oublier, oublier tout ça. Oublier ton envie de courir après le train que tu voudrais arrêter et que tu ne peux même pas ralentir. Mais y’a rien à envoyer au loin, surtout pas les souvenirs qui se font trop de plaisir à te revenir dans la gueule. Alors, reçois. Et avale.

Avale.

Derrière chaque rupture, chaque poignée de terre lancée dans un trou, derrière un dos qui se retourne, un dernier mot comme un bouée de sauvetage, une cigarette qu’on écrase comme s’éteint l’incendie sous des paupières trop usées, il y a un chemin. Et chacun ses allées. Et chacun à son rythme.

 

Ça pèse combien un deuil ? C’est long comme un couloir de la mort ou ça emprunte tout ce qu’il y a de plus sinueux dedans ?

Moi, je ferme. Je verrouille, me déshumanise un peu plus à chaque départ. Un jour, enfin, je ne sentirai plus rien. Pas par défi, mais par survie. Un jour, enfin, devant la mort, je serai plus froid qu’elle.  »

 

Auteur : Lilian Lloyd

Auteur, metteur en scène, scénariste, comédien, compositeur pas encore mort (1973-2000 et des poussières)

3 commentaires

  1. « Dans la vie d’un homme il y a 2 moments importants. Quand il part de chez lui ; et lorsqu’il revient…… »
    Aussi loin que je m’en souvienne, quand il fallu devenir homme et assumer…prendre des chemins…
    Je suis parti dans une autre vie, et j’avançai avec dans la tête ces chansons magnifiques qui ,je ne sais pourquoi , revenaient sans cesse. « L’italien » « la nuit je mens »…
    Et se demander si j’étais dans le train ou sur le quai à me regarder partir ou rester à quai…
    Un cailloux pour taper dedans.
    Et si c’était moi le cailloux. Façonné, buriné, à grand coups de rêves, de doux mensonges, de caresses aiguisées…
    Usé par tant de cigarettes américaines, de divorce à l’italienne…
    Par tant de sauts dans le vide…
    Et ce qui te reviens dans la gueule …même avec des tonnes de rides ;de cheveux blancs et de valises sous les yeux, te fait encore plus mal qu’a 20,30…40ans.que le plus dur en devient facile à avaler et le plus tendre si difficile à digérer.
    Je suis parti là ou vous m’avez laissé…quand je reviendrai, je serai parti pour de vrai…….
    Il est h00 du mat.je ne sais sur quel quai de gare je suis, dans 2h00 je vais me réveiller sans savoir quelle plaine j’aurais encore traversé………………
    Burinez, jouez….je ne serais jamais un grand « trop-fait »

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